Avec le photogramme, Évelyne Coutas montre comment la lumière agit sur le papier photo et se module en fonction d’objets ou de corps. Dans cette série intitulée “Cosmogonies”, l’artiste utilise la surimpression d’images sur rhodoïds pour créer des paysages nocturnes, emprunts d’histoire et de chimères. Ces compositions en noir et blanc, au fort contraste, sont de deux sources de lumière nocturne : celle produite et gérée par l’homme, nécessaire à l’éclairage des villes, et la lumière naturelle émise par les étoiles. En fusionnant certains composants plastiques du photogramme, flous et tracé en négatif, elle se réfère à l’origine de la photographie, les premiers daguerréotypes ou les calotypes et photogrammes d’Henry Fox Talbot.
Cette séquence photographique aux riches effets plastiques est une combinaison de reportages réalisés dans les villes environnantes de l’Arpajonnais avec la participation de JeanAntoine Bloc-Daudé, président du club d’astronomie de Breuillet, et la collaboration du service IGN de l’Essonne.
Aux prises de vue des parcours du territoire urbain, elle associe différentes vues du ciel, cartographies célestes et terrestres, pour créer des représentations proches d’une vision nocturne où les repères spatiaux se confondent, où la route s’ouvre à tâtons. En brouillant les pistes du reconnaissable, comme elle “aime jouer avec les représentations”, dit-elle, elle recrée des situations subjectives et imaginaires. Lorsque les formes apparaissent sans discernement comme à la lueur des routes peu fréquentées, la réalité rencontre la fiction, le réel familier des visions fantasmagoriques.
Dans un jeu d’échelle de plans et de recadrages, des glissements s’opèrent : la carte se déplie en fenêtre translucide ; le tracé circulaire de constellations s’éclipse en relief astral. Influencée par la pratique des landartistes dans le rapport qu’ils effectuent au site et au non-site, elle propose un nouveau rapport au paysage où se croisent divers univers.
Dans un jeu de distance et d’accommodation, une nouvelle cartographie mêlant espace physique et mental s’écrit à la lumière d’une nuit noire.
Karine Maire
in Catalogue « Biennale la Science de l’art 2011, la lumière »
Conseil général de l’Essonne.
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